Quand les coûts du solaire deviennent négatifs, y compris pour les industriels

lundi 30 septembre 2024 :: perrick :: Connexe(s) :: aucun commentaire :: aucun trackback

Chaque année, le nombre d'heures avec des prix négatifs pour de l'électricité aux Pays-Bas augmente : Martien Visser en tient une comptabilité régulière.

nombre d'heures avec des prix négatifs pour de l'électricité aux Pays-Bas - septembre 2024

Jenny Chase - analyste sur Bloomberg - ne dit pas autre chose :

By 2030 most countries will have spot power prices of zero in sunny hours. This will be passed on to end consumers, to encourage them to shift power demand to sunny periods by electric vehicle and battery charging, preheating, precooling, etc.

Mais que se passe-t-il quand les clients finaux sont des industriels ?

J'ai eu l'occasion de faire ce mois-ci, le deuxième Safari Lean. Après des visites dans le Nord en 2023, c'est entre Lyon et Genève que notre mini-bus s'est promené. Et nous avons eu l'occasion de parcourir une usine tout-automatique ou presque, fonctionnant en 5 x 8. Est-ce qu'un jour ils arrêteront les lignes de production la nuit parce que l'électricité y est trop cher ?

Le matin, c'était dans une usine d'assemblage de camions que nous avions exploré un véritable attachement au développement des personnes. Les équipes arrivent à 7h pour terminer vers 15h30 : il n'y pas de 2 x 8, tout le monde est synchro en journée (sauf l'équipe maintenance qui bosse en soirée et/ou la nuit). Est-ce que d'ici quelques années l'heure d'embauche dépendra du soleil, avec 3 minutes de décalage chaque jour ? Avec interdiction de prendre ses congés entre mai et août quand les journées sont les plus ensoleillées ?

Quel vertige d'imaginer non seulement les contraintes industrielles et techniques mais aussi les évolutions sociétales !

Lean Safari entre Lyon et Genève - septembre 2024
Lean Safari entre Lyon et Genève - septembre 2024
Lean Safari entre Lyon et Genève - septembre 2024
Lean Safari entre Lyon et Genève - septembre 2024
Lean Safari entre Lyon et Genève - septembre 2024

Du souffle sur un petit écran : Akeji et Asako Sumiyoshi

lundi 13 mai 2024 :: perrick :: Connexe(s) :: 2 commentaires :: aucun trackback

Je ne sais plus quand je suis allé au cinéma pour la dernière fois. Bien avant le Covid en tout cas, probablement au milieu des années 2010. Ce qui s'en rapproche le plus reste de temps en temps un film d'animation avec les enfants sur le vidéo-projecteur apporté du bureau. Mais il y a une semaine j'ai sorti ma CB pour m'offrir une séance sur petit écran.

Magie de mes errances numériques, j'avais découvert l'existence d'un documentaire sorti en salle en 2019 sur un Trésor Vivant - cette fois maître de sabre et de calligraphie - que le Japon produit et honore : Akeji, le souffle de la montagne.

Un gros rhume m'offrait une de ces soirées vides et creuses, où le temps s'étire aussi facilement que le corps peine à prendre son espace habituel. Lent et fourbu il exige repos, calme et tisane bien chaude. Et c'est alors que la Forêt, le Vent, les Esprits m'ont envahi. Le vieux couple japonais isolé dans sa montagne dégageait tellement de sagesse, leur simplicité transperçait le temps et mes urgences, j'étais conquis.

Un dessin de Akeji flottant au vent

J'avais déjà fabriqué des encres avec les filles : j'en suis sorti avec l'envie renouvellé de percer les couleurs cachées dans les baies, les noix ou les écorces tout autour de la maison. Il faudra aussi (re)goûter aux secrets des forêts de la vallée d'Himuro à travers de celles que traverse l'Aube ou l'Automne et persévérer avec le sabre quand la lame, aussi souple que menaçante, découpe l'air et astreint au respect.

Forcément j'arrive trop tard pour sa grande exposition à Paris au musée Cernushi (c'était en 2022 - 2023) ou celle à la Biennale d'Autun (encore plus lointaine, en 2017).

Il me reste bien une question : pour ses idéogrammes blancs, a-t-il trouvé des pigments dans ses montagnes (avec du gypse ? du titane ?) ou bien réussit-il à me subjuguer avec un masque qui disparaitrait une fois immergé dans la rivière ? J'attends désormais la prochaine exposition pour pouvoir apprécier ses oeuvres "en vrai" et commencer à échauder de nouvelles hypothèses. Pour partager mon impatience, il ne reste qu'un peu de sagesse à semer...

Il faut en laisser [des baies] pour les corbeaux et les ours

Note : ce documentaire de Mélanie Schaan et Corentin Leconte est disponible sur la plateforme Tënk.

La santé par le sport pour les grands-parents

jeudi 29 décembre 2022 :: perrick :: Connexe(s) :: aucun commentaire :: aucun trackback

Je connaissais Daniel Lieberman via un excellent livre Born to Run dans lequel est relatée sa thèse : la niche écologique de l’espèce Homo tient dans ses capacités d’endurance (et non dans sa force comme les autres primates et nombre d’autres carnivores). Je le découvre à nouveau dans un podcast en train de faire l’éloge de l’exercice pour les grands-parents, source première de santé à ces âges de post-reproduction.

Forcément dans un de ses derniers opus The Metaverse is Not a Place, Tim O’Reilly dévoile en filigrane sa propre routine pour tenir cette forme : avec sa femme, il rejoint une amie tous les jours via Zoom et Peloton pour 45 d’entraînement. Un autre de ces pionniers de la Silicon Valley - Stewart Brand - file régulièrement en salle de fitness pour des sessions de CrossFit (à 80 ans passés). Idem encore pour un Nassim Nicholas Taleb qui après avoir transformé son physique par les poids libres, pratique désormais assidûment le vélo.

Sans que les uns se soient forcément concertés avec les autres, la concordance m’a fait sourire et dévoile une autre facette de cette Silicon Valley, toujours si prompte à créer des interactions entre chercheurs, innovateurs et expérimentateurs. Cela tombe bien, le monde vieillit à vitesse grand V. On va en avoir besoin...

Même les nuages diffèrent en traversant la Manche

mardi 26 octobre 2021 :: perrick :: Connexe(s) :: aucun commentaire :: aucun trackback

Hasard (ou pas) de ma timeline, les échos sur le Cloud qui m'arrivent dissonent grandement.

Il y avait depuis quelques jours l'annonce française d'une norme pour un Cloud de confiance : faisant fi des prétentions d'un Cloud souverain, il se traduisait par un accord entre Thales et Google et un autre autre liant Capgemini et Orange avec Microsoft. Parallèlement les services secrets britanniques annonçaient la signature d'un contrat pour l'hébergement de leurs données sur la plateforme AWS d'Amazon.

On pourra regretter que les sujets de sa Majesté aient choisi le leader mondial alors que les Français se contentaient des poursuivants déjà en perte de vitesse... Mais la dissonance qui m'atteint touche plutôt au grand écart qu'il peut y avoir entre un Simon Wardely (anglais, dont j'apprécie énormément les travaux de recherche sur l'écosystème numérique) :

Et un Octave Klaba citant Tariq Krim (français, dont j'apprécie énormément les aventures entrepreneuriales et les produits) :

Client d'OVH (et pas d'AWS), j'imagine que j'ai déjà fait mon choix...

De la virtualité du système politique aux USA

vendredi 16 octobre 2020 :: perrick :: Connexe(s) :: aucun commentaire :: aucun trackback

Rarement l’écoute d’un podcast, en l'occurence un épisode des « Venture Stories » History Has Begun with Bruno Maçães, n’avait autant secoué mes quelques neurones de plouc en province : et si la virtualité du système politique états-uniens n’était pas un bogue, mais une fonctionnalité. C’est la thèse pour le moins originale de Bruno Maçães, un homme politique portugais aussi à l’aise sur les routes de la Soie que dans la Silicon Valley. Je le connaissais un peu pour ses essais sur la Chine et il revient avec un livre - que je n’ai pas encore lu - sur l’Amérique du XXIe siècle : History Has Begun. Pour (mal) résumer une phrase sa pensée, la virtualité permet d’aller plus loin dans les expériences de chacun. On peut jouer à se faire peur avec un dictateur fasciste comme Trump ou profiter de Twitter pour plonger dans une pseudo-révolution « woke », mais sans les coups et ni les blessures. Au passage, cette virtualité permet aussi de s’affranchir du libéralisme (avec son cortège de contraintes universalisantes) pour construire ses histoires et les partager à son petit monde, sans être rattraper par une réalité bien trop terre à terre.

History Has Begun - Bruno Maçães

Bien sûr en quittant le monde des faits partagés, les communautés américaines s’approchent dangereusement de l’attracteur « hors-sol » si cher à Bruno Latour. Un deuxième contre-point à cette théorie politique (que Bruno Maçães accepte donc comme falsifiable, puisqu’il est surtout chercheur en sciences politiques) se loge dans le travail d’enquête que Paul Jorion effectue depuis son Morbihan d’adoption sur son pays de coeur. Avec un long passage en Californie, une expérience de psychanalyste et un bagage d’anthropologue, il propose une analyse circonstanciée de la « météorite Trump » : entre kompromat russe, haute trahison et sédition sudiste, il détecte un véritable proto-fascisme dans ce personnage de télé-réalité à l’ego hypertrophié et au charisme certain.

Haute Trahison - Paul Jorion

Entre ces visions et constructions intellectuelles aussi opposées qu’argumentées, les élections du 3 novembre 2020 devraient permettre d’y voir un peu plus clair : la réalité pourrait finir par rattraper l’une ou l’autre. Ce n’est pas tous les jours qu’on peut s’attendre à un dénouement en théorie politique à si brève échéance…

Public Service Broadcasting régale en musique mes oreilles de nerd un temps londonien

dimanche 27 octobre 2019 :: perrick :: Connexe(s) :: aucun commentaire :: aucun trackback

Le costume-cravate n'est plus l'apanage des financiers de la City londonienne. Il orne aussi les pochettes d'album et les scènes de festival rock, à commencer par ceux de Public Service Broadcasting. Je les ai découvert cette semaine : un mélange de rock (guitare, basse, batterie), de samples (tirés de l'histoire industrieuse et industrielle du Royaume-Uni) et de cet humour pincé si anglais. Un régal pour tous les nerds... depuis 2013.

Sans oublier le passage aux BBC Proms pour fêter les 50 ans du premier atterrissage sur la Lune.

De l’anglais politique en contexte numérique

mercredi 9 octobre 2019 :: perrick :: Connexe(s) :: un commentaire :: aucun trackback

Avoir vécu à Londres pendant presque 10 ans et lire en anglais tous les jours (aussi bien des livres que des blogs et des sites d’actualités) ne me sont pas suffisants pour suivre les nouvelles outre-Manche et outre-Atlantique. Le contexte y est tellement particulier, électrique et inhabituel que je n’arrive plus à suivre les saillies des principaux protagonistes sans devoir me référer périodiquement à un dictionnaire de bonne taille. Des mots plutôt rares reviennent à la surface et accrochent les gros titres.

Dans la pêche récente, il y a le humbug (fumisterie) de Boris Johnson à propos du jugement de la cour suprême britannique, celui qui lui impose la reprise des sessions parlementaires. Plus tôt il y avait eu le flails (s’agiter dans tous les sens) d’un Donald Trump confronté à une carte météorologique. Et le ping-pong continue entre les bedlam (chahut) et autres trantrum (crise de colère) du président américain et les uncooperative crusties  (bourrus refusant de coopérer) ou fish puns (calembours à base de poisson) du premier ministre anglais. Visiblement cette exubérance stylistique fait partie d’un art consommé de la langue de Shakespeare. Mais comme mot de la fin, je vous laisse avec le toerag d’un sujet de sa Majesté

Du consensus vacillant sur le libre-échange et de ses conséquences pour Euratechnologies

vendredi 7 juin 2019 :: perrick :: Connexe(s) :: aucun commentaire :: aucun trackback

En début de semaine, j'ai participé à un échange avec Pierre Moscovici : le commissaire européen faisait un tour dans le Nord et le Pas-de-Calais pour parler Brexit (entre autres). Dans cette discussion, forcément convenue et hyper-calibrée, j'ai été marqué par un aveu de la part d'Euratechnologies via la voix de son directeur Raouti Chehi : il n'y a aucun partenariat avec d'autres structures - incubateur, accélérateur ou autre - en Europe. Alors qu'il y en a avec le Brésil, les Etats-Unis, le Canada, la Chine et la Corée du Sud.

Pendant ce temps, Noah Smith - ancien chercheur en économie à Stony Brook University et récent fan de Elizabeth Warren - qui écrit régulièrement chez Bloomberg et encore plus sur Twitter, note en particulier :

Je me dis - et je ne suis pas le seul - qu'il va y avoir un grand besoin de faire évoluer quelque peu la stratégie de ma zone d'activités favorite. Celle qui ne se donne pas de limites pour créer des entreprises et des emplois, et les bâtiments qui vont avec.

D'autres bureaux presque finis, toujours à Euratechnologies
Des bureaux en chantier à Euratechnologies

Bon vent, Monsieur Pierre Lazuly

mardi 26 mars 2019 :: perrick :: Connexe(s) :: aucun commentaire :: aucun trackback

J'apprends à l'instant la mort de Pierre Lazuly, Monsieur Pierre Lazuly. Je dis bien « Monsieur » parce que sa plume, à travers les Chroniques du Menteur et quelques articles au Monde Diplomatique, avait le don de toucher l'essence de notre réseau internet. Pierre angulaire du web indépendant de la grande époque (au tournant des années 2000) il l'aura marqué de son empreinte : SPIP, le manifeste du web indépendant, Rezo.net, Chronic'Art et tant d'autres blogueurs.

Si nous avions échangés quelques emails entre 1998 et 2003, c'est l'invitation que je n'ai jamais pu honorer (sa Bretagne n'était pas si loin de mes grands-parents à l'époque) qui reste coincé quelque part au milieu de la gorge. Il y a des voyages sans retour. Bon vent, l'ami. Tes chroniques nous restent encore un peu.

Le système familial selon Emmanuel Todd : un modèle pour décrypter le monde

dimanche 8 avril 2018 :: perrick :: Connexe(s) :: aucun commentaire :: aucun trackback

Il y a des modèles qui ont peu à peu trouvé un chemin dans mon cerveau : le système familial d'Emmanuel Todd fait partie de ceux-là.

Pour comprendre l’attachement populaire à la SNCF et la cagnotte de soutien aux cheminots, il pourrait être suffisant d’avoir en tête les valeurs universalistes et égalitaires des familles nucléaires égalitaires, telles qu’on les trouve dans le bassin parisien. En franchissant le pas suivant (Paris, c'est la France), on découvre que les Français défendent "leur" SNCF, celle qui promet des trains relativement bon marché, si possible ponctuels et surtout équitablement répartis sur tout le territoire, celle qui a été nationalisée une première fois en 1937 au crépuscule du Front Populaire en sauvant de la faillite des acteurs privés, celle qui offre à ses propres employés et à ceux de la France - les députés - des billets gratuits. J’imagine sans peine les Allemands ou les Suédois (de familles souche l’un comme l’autre) n’y rien comprendre. Idem pour nos élites teintées d’atlantisme (et leurs familles nucléaires absolues, indifférentes à l’égalité).

Le dernier ouvrage d’Emmanuel Todd - Où en sommes-nous ? - reprend toutes les déclinaisons de son système pour embrasser en moins de 500 pages une histoire du monde. Plutôt que de décrire ici toute sa typologie et d’en paraphraser maladroitement tous les fruits, voici un petit florilège puisé indirectement dans mes lectures récentes.

Que la famille Souris prépare le nouvel an ou qu'elle cherche une nouvelle maison, elle comprend trois générations : grand-père et grand-mère, papa et maman, une ribambelle de frères et soeurs. C'est bien une famille souche qui nait sous le trait magnifique de Kazuo Iwamura. Je ne suis pas certain que les japonais puissent imaginer le Petit Chaperon Rouge traversant une terrible forêt afin de retrouver sa mère-grand : mettre une telle distance entre parents et grands-parents doit être inconcevable.

Dans Si la Chine était un village, Hong Liang nous parle du sien : Liangzhuang. Depuis plus de 300 ans, trois clans y sont installés : les Han, les Liang et les Wang. Les premiers « ont de la culture, de l'éducation, les grandes familles de ce clan ont toutes donné naissance à des gens très compétents. Les propriétaires fonciers, les despotes locaux, les paysans riches éliminés lors de la réforme agraire appartenaient tous au clan Han. Les Liang ne sont pas aussi cultivés, parfois malins ou naïfs. Les Wang sont tous des bons à rien, des bouches inutiles. » Au fil des anecdotes mettant aux prises les uns et les autres avec la modernité teintée de corruption qu’impose le Parti, on sent poindre tous les tiraillements de ces familles communautaires exogames ayant comme valeurs cardinales l'autorité (du père) et l'égalité (des fils).

Pete Saunders, un américain, s'est lancé dans une Big Theory de l'urbanisme des Etats-Unis. Calquée sur les travaux de William Strauss et Neil Howe dans The Fourth Turning, il identifie pour chaque génération (une vingtaine d'année) un type urbanistique différent et singulier. Par exemple, pour les années 1900-1920, ce sera la grille rigide s’accordant au tramway. Ou pour les années 1990-2010, la McMansion : cette grosse et grande demeure si caricaturalement uber-architecturale, véritable SUV sans roues. Par cette tentative théorique, il offre un échantillon des conséquences des familles nucléaires pures si caractéristique des USA. Ils se permettent la création de nouvelles cités à chaque génération, toujours dans un entrain naïf, déterminé et volontaire, en appliquant tout aussi facilement le véritable corollaire : l'abandon pur et simple de certaines villes.

Big data et opération de déstabilisation : le monde académique en est au cœur

lundi 19 mars 2018 :: perrick :: Connexe(s) :: aucun commentaire :: aucun trackback

En décembre 2017, Jeff Nesbit - un ancien directeur des affaires publiques et légales de la National Science Foundation - décryptait les vecteurs des financements qui avait permis des travaux de recherche sur l'exploration algorithmique de tous les contenus du web puis l'éclosion de Google : des entités plutôt reliés à la "communauté du renseignement" (CIA et NSA donc) via leur Massive Digital Data Systems (MDDS) project.

Ce week-end, The Guardian mettait au jour l'immense collecte de données effectuée via des profils Facebook qui, de fil en aiguille, permettra aux techniques de déstabilisation politique des succès éclatants avec le Brexit puis Trump. Là encore le point focal se trouve dans les murs feutrés d'une université, celle de Cambridge en l'occurence, où le chercheur Aleksandr Kogan utilisait - entre autres - des bourses russes pour effectuer ses recherches puis commercialisa à une société privée ces données, une commercialisation interdite à la fois par les règles de Facebook et par la législation du Royaume-Uni.

Cambridge Analytica: how the key players are linked - The Guardian

Qu'un des maillons faibles de nos sociétés démocratiques se trouve dans le monde académique avait déjà été pointé par Jane Jacobs dans son opus Dark Age Ahead : the combination of the appearance of professional respect for science rigor coupled with professional contempt for scientifically rigorous behaviour is toxic. Une remarque sur la décadence de l'Université qu'avait aussi noté Nicolas Kayser-Bril et que traque Olivier Ertzscheid au quotidien. Avec facteur H, financements au lance-pierre par "projet", fusion & autonomie, baisses de dotations, classement de Shangai et autres joyeusetés, bien malin qui trouvera la porte de sortie par le haut...

Le bilan d'appétance, une recette officieuse

lundi 12 février 2018 :: perrick :: Connexe(s) :: aucun commentaire :: aucun trackback

En attendant que Stéphane Bagnier daigne enfin mettre en ligne l'explication officielle de son bilan d'appétance, je vous propose ma propre retranscription. Bien sûr, si vous utilisiez ces quelques notes pour monter un atelier avec amis ou collègues et que cet atelier s'avérait un échec cuisant, ce serait entièrement de ma faute et en aucune manière celle du créateur original.

Mon bilan d'appétance en janvier 2017

En premier lieu il s'agit de poser un contexte favorable : vous aurez sous la main une grande feuille, des stylos ou feutres de plusieurs couleurs, des gommettes (en option), une table et une chaise, une vue agréable et calme ainsi qu'une heure de temps libéré du téléphone portable, des enfants ou du patron (c'est selon) et des autres distractions de la vie moderne.

Premier exercice / 15 minutes : prenez le temps d'écrire, de dessiner, d'exprimer de manière créative vos fiertés petites et grandes. C'est l'occasion de se fixer au présent avec sa propre histoire, de se rapprocher doucement des belles choses que vous avez réalisés et qui seront autant de cailloux blancs pour la suite.

Mon bilan d'appétance en janvier 2017 - exercice n°1

Deuxième exercice / 10 minutes : tracez trois cercles qui s'entre-croisent. Vous y noterez dans le premier les activités que vous aimez, dans le deuxième celles qui vous sont faciles et dans le troisième celles qui sont rémunératrices. Bien entendu les différentes intersections vous permettront de calibrer au mieux telle ou telle pratique en la répartissant au plus juste.

Mon bilan d'appétance en janvier 2017 - exercice n°2

Troisième exercice / 15 minutes : esquissez un grand tableau avec 3 lignes et 3 colonnes. Les neuf cases seront remplies par autant de "vies dans 10 ans". Sous la bannière Ethos, la première ligne rassemblera des vies tout à fait légitimes : celles où il suffit d'appuyer de plus en plus fort sur des tendances déjà à l'oeuvre en ce moment même. Sous le drapeau Logos, les trois vies suivantes auront fait preuve d'intelligence, de ruse et d'astuce pour déblayer des terrains moins évidents. Enfin avec Pathos comme étendard, les trois vies finales seront guidées par un altruisme sans faille, quand seul le coeur aura dicté sa loi.

Quatrième exercice / 10 minutes : distribuez des prix à chacune de ces vies possibles. Il faut octroyer : quotidien / défi / accessible / autonomie / juste / social / apprentissage / créativité / congruent. Et bien sûr il y a aussi deux cartons rouges possibles qui commandent l'éviction de certains possibles : inadapté / inatteignable. Les gommettes permettront de valoriser cette cérémonie officielle qui marque la clôture de l'atelier.

Mon bilan d'appétance en janvier 2017 - exercices n°3 et 4

Vient ensuite le moment de la rétrospection et de la rétrospective. Voici quelques questions pour ouvrir les échanges avec soi-même ou avec les autres participants...

Mon bilan d'appétance en janvier 2017 - le résultat complet

L'autre histoire avec Philippe Meyer : le Nouvel Esprit Public ne se finance plus avec l'argent public

lundi 6 novembre 2017 :: perrick :: Connexe(s) :: aucun commentaire :: aucun trackback

Il y avait donc une autre histoire avec Philippe Meyer, il est plus que temps d'en parler. Plus que temps puisqu'il ne reste plus qu'une poignée d'heures pour financer son Nouvel Esprit Public. Je viens enfin de le faire parce que 1/ il a compris quelque chose du numérique (en peau de caste, des pages éparpillées sur différentes plateformes comme autant de cailloux blancs, une campagne de financement participatif, un site web pour retrouver un semblant d'unité) et du service public (un échange continue avec les auditeurs, une retenue sur les faits, un mélange d'humour et de bonhommie), 2/ j'ai longtemps regretté de ne pas avoir découvert cette émission plus tôt (elle est depuis devenu une des raisons de faire un petit tour en courant le dimanche soir), 3/ les invités préparent leur sujet, s'écoutent, se respectent et parlent sans crainte de la virgule (les gros yeux de Philippe Meyer suffisent visiblement), et 4/ l'hôte ne se lasse pas de distinguer éditorialistes et journalistes et de préférer aux commentaires convenus un résumé efficace des thématiques abordées.

Bien sûr les critiques ne manquent pas : des hommes ergotant sur les différentes nuances du "centre" à la française auront toujours besoin d'une Nicole Gnesotto pour montrer que les chemins démocratiques existent à gauche ou d'un Lionel Zinsou pour apporter une couleur moins franco-française aux débats. Mais j'espère que ma modeste contribution permettra aux émissions de l'été, de Pâques et de Noël de se poursuivre elles aussi : j'avais par exemple découvert Pierre Veltz et sa société hyper-industrielle ou Pascal Brice, directeur de l'Ofpra à ces occasions.

De nos footballeurs et de leurs dirigeants

jeudi 12 octobre 2017 :: perrick :: Connexe(s) :: aucun commentaire :: aucun trackback

En 2015, côté football, c’était la question d’un désenchantement pour la génération 1987 qui se posait. En 2016, changement de braquet : la génération 1993 tentait de s'imposer en Equipe de France; les 1997 s’offraient un championnat d’Europe; pendant que la génération 1998 profitait d’un portrait longitudinal du Monde, derrière la fusée M’Bappé. Pour la génération suivante, les premiers 2000, on peut déjà aller piocher dans l’exégèse des supporteurs. A la Fédération Française de Foot en tout cas le chemin est balisé : mini-Bleus, Bleuets puis Espoirs. Avec son lot d’éclosions non fédérales (pour ceux qui ne visiteront Clairefontaine que très tard dans leur carrière) et de déconvenues professionnelles (pour les blessés et aux « sans marge de progression »).

C’est cette même rigueur du renouvellement que j’ai découvert à travers la plume d’Alex Payette sur le site Asialyst.com : Chine : regards sur les dirigeants de demain. Les élites s’y distinguent par génération (notre cher président Macron aurait ainsi fait parti des 70后干部) et par rang (dans cette génération-là, les cadres plus « méritants » – 11 – sont au stade vice-provincial, pendant que la plupart – 256 – sont au stade préfectoral). Il est ainsi possible de suivre de l’extérieur les performances relatives des uns et des autres dans la quête du Bureau Politique du Parti communiste chinois. Les scrutateurs avisés iront jusqu’à déceler les affiliations des uns et des autres : Xi Jinping, Wang Qishan ou encore Hu Jintao ont chacun leur propre lignée.

Tout le monde n’a pas la chance d’avoir des quadras qui rêvent de casser les codes : la démocratie française a la vision long terme qu’elle peut… Les Chinois ont juste une parenthèse de deux siècles à fermer.

La démographie renversera trois tendances globales pluri-décennales : taux d'intérêt, inflation, inégalités

lundi 11 septembre 2017 :: perrick :: Connexe(s) :: aucun commentaire :: aucun trackback

De temps en temps, je découvre un papier suffisamment convaincant pour avoir envie de le partager. Parce qu'il est argumenté et défend une thèse peu orthodoxe. C'est le cas avec Demographics will reverse three multi-decade global trends de Charles Goodhart et Manoj Pradhan, chercheurs invités par la Banque des règlements internationaux.

As the world ages, real interest rates will rise, inflation and wage growth will pick up and inequality will fall.

La thèse tient en une ligne : avec le vieillissement du monde, les taux d'intérêt vont augmenter, l'inflation et les salaires finiront par suivre, et les inégalités par diminuer. Tout ça parce que les Chinois et les Européens de l'Est en âge de travailler commencent à se retirer du marché du travail mondial : les joies de la démographie appliquée à l'économie.

Ces raisonnements basés sur la démographie sont parfois étonnants : Emmanuel Todd l'avait utilisé pour déceler l'écroulement du monde soviétique, pour Malthus les prédictions se sont révélés moins intéressantes. Reste que le papier en question, plutôt léger en équations mathématiques, se lit plutôt bien et s'offre au passage une petite polémique avec Thomas Piketty. En tout cas le Daily Telegraph, lui, ne s'embarrasse par des demi-mesures dans son article sur cette théorie : La dernière fois que les serfs d'Europe se sont soudainement trouvés en grande demande a été après la Peste noire au milieu du XIVe siècle. Certains disent que cela a mis fin à la féodalité. Reste donc à savoir où il faudra en être dans l'avancement de la servitude avant que ces tendances s'inversent effectivement !